Être cadre aujourd’hui consiste de plus en plus, à être le porteur et le garant d’une ligne managériale paradoxale, à jouer le rôle que les directions d’entreprises tentent de nous imposer, à nous sentir responsable et sans condition, de la mise en œuvre de directives imposées.
Nous sommes supposés laisser au vestiaire nos convictions profondes, notre liberté de pensée et d’opinion, nos droits citoyens les plus fondamentaux.
Au fur et à mesure que les conditions sont créées pour précariser la situation des cadres, l’exigence d’adhésion à la politique de l’entreprise est plus forte. De même que le patronat pousse pour que le contrat de travail passe d’une mise à disposition de moyens pendant un temps donné, à une obligation de résultats quasi-permanente, le glissement s’opère : nous devrions non seulement engager notre savoir-faire au service de l’entreprise mais également « un savoir-être » prédéfini par une charte « éthique » ou un « code de bonne conduite ». Quelle est cette « éthique » qui vise à priver l’individu de son libre arbitre pour le transformer en exécutant sans aucun droit statutaire ?
Nous nous reconnaissons comme des salariés, au même titre que les autres. Mais nos fonctions, nos niveaux de responsabilités, notre technicité et notre rôle dans l’organisation du travail nous confèrent une spécificité. La CGT des cadres et des technicien-ne-s propose un statut de l’encadrement assurant à chacun des droits et libertés garantis collectivement et le plein exercice de ses responsabilités sociales. C’est l’objet de cette charte de l’encadrement.
Être cadre aujourd’hui, consiste de plus en plus, à être le porteur et le garant de l’idéologie patronale, à jouer le rôle que les directions d’entreprises tentent de nous imposer, à nous sentir responsable et sans condition, de la mise en œuvre de directives imposées. Nous sommes supposés laisser au vestiaire nos convictions profondes, notre liberté de pensée et d’opinion, nos droits citoyens les plus fondamentaux.
Au fur et à mesure que les conditions sont créées pour précariser la situation des cadres, l’exigence d’adhésion à la politique de l’entreprise est plus forte. De même que le patronat pousse pour que le contrat de travail passe d’une mise à disposition de moyens pendant un temps donné, à une obligation de résultats quasi-permanente, le glissement s’opère : nous devrions non seulement engager notre savoir-faire au service de l’entreprise mais également «un savoir-être» prédéfini par une charte « éthique » ou un « code de bonne conduite ». Quelle est cette « éthique » qui vise à priver l’individu de son libre arbitre pour le transformer en exécutant sans aucun droit statutaire ?
Nous nous reconnaissons comme des salariés, au même titre que les autres. Mais nos fonctions, nos niveaux de responsabilités, notre technicité et notre rôle dans l’organisation du travail nous confèrent une spécificité. L’Union Générale des Ingénieurs, Cadres et Techniciens CGT propose un statut cadre assurant à chacun des droits et libertés garantis collectivement, le plein exercice de son métier et de ses responsabilités sociales.
C’est l’objet de cette charte !
UNE RECONNAISSANCE À
RECONQUÉRIR POUR TOUTES ET TOUS
SALAIRES ET CARRIÈRES
Année après année, dans le public comme dans le privé, nous subissons une stagnation voire une régression de notre salaire fixe au profit d’une part variable de plus en plus aléatoire. Les grilles salariales sont attaquées et remises en cause. Individualisée et déconnectée de la qualification, notre rémunération devient arbitraire. L’individualisation a tiré nos salaires vers le bas. Par ailleurs, le développement des dispositifs de participation financière et d’épargne salariale vient en opposition au salaire et fragilise la protection sociale au travers des exonérations de cotisations.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- L’embauche systématique en CDI ou emploi statutaire dès le 1er poste.
- Reconnaître les diplômes et les formations, dès le premier emploi, par une grille de salaires d’embauche avec des seuils correspondant aux différents niveaux de qualification. Plancher minimum égal ou supérieur au plafond de la Sécurité sociale pour les cadres (37 032 € brut annuel en 2013).
- Assurer l’équité et la transparence pour faire échec à l’arbitraire, sous toutes ses formes, dans les évolutions de carrière avec un dispositif de recours où siègent les représentants du personnel.
- Imposer l’égalité professionnelle entre femmes et hommes. Interdire toute discrimination, qu’elle se rapporte au salaire, à la reconnaissance des diplômes ou qualifications, à l’accès aux fonctions, au déroulement de carrière, ou à tout autre élément constitutif des responsabilités professionnelles.
- établir une grille de classification salariale qui traduise la progression de notre qualification.
- Garantir, au titre du pouvoir d’achat, une évolution du salaire fixe annuel égale au minimum à l’évolution du montant du plafond de la Sécurité sociale.
- L’intégration des années d’études dans le calcul des droits à la retraite.
FORMATION
Notre formation est trop souvent limitée à une adaptation aux objectifs des entreprises (ou administrations) et à une intégration aux critères de gestion qu’elles décrètent.
La Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences, les nouvelles compétences requises pour occuper un poste donné ne doivent pas servir de prétexte aux employeurs pour refuser la progression de carrière ou la reconnaissance des qualifications acquises. C’est une démarche à courte vue, dictée par les besoins immédiats des employeurs.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Construire une véritable gestion prévisionnelle quantitative et qualitative, fondée sur l’évolution des besoins sociaux, permettant l’adaptation à l’évolution des métiers.
- Faciliter l’insertion professionnelle lors de l’exercice d’un premier (ou nouvel) emploi en l’accompagnant de dispositions et/ou de formation.
- Faire de la VAE un support de reconnaissance, un droit individuel opposable à l’employeur garanti par le statut/la convention collective. Ce droit doit s’appliquer dans le cadre de procédures collectives, au sein des instances représentatives.
- Consacrer au moins 10 % des heures travaillées à la formation professionnelle accessible sur le temps de travail.
SANTÉ AU TRAVAIL
Dévoyant notre aspiration à l’autonomie, le management actuel a favorisé notre isolement et des formes de mises en concurrence. La course sans fin à la performance a des conséquences sur notre santé physique et mentale. La pression générée par les rythmes, les objectifs à tenir, les restructurations permanentes, l’absence de marge d’expression et de libre arbitre, les mises au placard constituent des facteurs de souffrance des managers et des managés. Ce phénomène se généralise avec des conséquences tragiques pour les salariés. L’éloignement des centres de décision, les directions insaisissables, l’absence d’interlocuteur, le fait de nier les conflits ou de laisser perdurer les incompréhensions, participent au phénomène.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Le rôle des cadres doit être orienté vers la restauration du collectif de travail, lui-même tourné vers le partage de l’expérience et du sens.
- La mise en place d’espaces de discussion professionnelles, permettant d’évoquer et de résoudre les difficultés rencontrées pour exercer un travail de qualité respectant les règles de l’art de leur métier.
- Recourir à un tiers (CHSCT ou autre instance représentative) en cas de conflit, permettant ainsi d’échapper à un face à face insoluble entre le cadre et sa hiérarchie.
- Doter les CHSCT d’un pouvoir d’intervention renforcé en lien avec les organisations syndicales et les services de santé au travail, pour faire aménager les charges de travail, dès lors qu’une présomption de stress apparaît.
RYTHME DE TRAVAIL
Bien souvent, nous travaillons plus de quarante heures par semaine. Ces dépassements horaires ne sont pas systématiquement pris en compte dans notre salaire. La pression sur les rythmes, les délais de plus en plus courts et les objectifs de plus en plus ambitieux, conduisent les cadres à faire toujours plus d’heures. La généralisation du forfait en jours intensifie ce phénomène. Cela contribue à déprécier notre technicité, nos compétences et nos responsabilités.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Respecter l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle en encadrant les plages horaires des réunions et en limitant l’usage des TIC en dehors des heures collectives de travail.
- Pour le télétravail : le respect ou l’amélioration par accord de branche ou d’entreprise, des dispositions contenues dans l’accord interprofessionnel du 19 juillet 2005 prévoyant en particulier la non exclusion des salariés « nomades ».
- Alléger les charges de travail et les évaluer collectivement.
- Décompter toutes les heures effectuées quel que soit le type de forfait pour récupération ou éventuellement paiement, afin de respecter la durée légale du temps de travail et de repos obligatoire, afin de préserver la santé de chacun.
- Favoriser les dispositifs permettant la cessation progressive d’activité pour les séniors sans discrimination professionnelle.
NÉGOCIER LES OBJECTIFS ET LES
MOYENS DE LA RESPONSABILITÉ
RESPONSABILITÉ SOCIALE
Le patronat cherche à instrumentaliser les cadres à sa stratégie. Trop souvent la référence à l’éthique et à la responsabilité sociale des entreprises est utilisée à la façon d’un « faux nez », afin de masquer une réalité moins présentable : les chartes éthiques, les codes de bonne conduite, l’affichage de valeurs sous la forme d’engagements tels que le respect des personnes, de l’environnement, constituent autant d’outils de cadrage des pratiques managériales.
Ainsi les cadres des entreprises se retrouvent au centre de la contradiction entre un discours vertueux et une réalité plus brutale, en tant « qu’acteur » ayant à assurer la propagation d’idées « généreuses », tout en assumant la mise en œuvre de politiques contraires et en endossant les responsabilités (morale, juridique) qui naissent de cette contradiction.
Les intérêts des actionnaires et leur exigence de rentabilité sont de plus en plus des obstacles au développement durable, à l’efficacité sociale et économique. Oubliées, les promesses sur la place et le rôle incontournable des cadres, pour le progrès des sciences, des techniques, de l’humain, de l’entreprise, de leur environnement.
Alors qu’il s’agirait de répondre à des défis écologiques, énergétiques, éthiques, sociaux inédits, le productivisme, l’accumulation financière et son avidité au profit laminent le sens du travail, écrasent les valeurs éthiques. La capacité « d’autorégulation » affichée par les engagements des directions est manifestement limitée.
Lorsque les entreprises évoquent la « loyauté », nous posons la question de son fondement : quels en sont les objectifs ? Répondre aux actionnaires, aux clients-usagers, aux salariés ? Aggravé par la crise, le bilan atteste que les discours lénifiants ne peuvent suffire. Le sens et l’organisation du travail doivent être guidés par la recherche d’une efficacité économique et sociale durable, en opposition à une rentabilité financière de court terme. Il faut anticiper au-delà des stratégies des employeurs et de la sphère financière.
Il importe de refuser les injonctions fondées sur les « valeurs », en exigeant dans chaque contexte de travail une analyse précise de ce qu’implique le principe, de quels moyens et marges de manœuvre on dispose pour le mettre réellement en œuvre.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Garantir la liberté d’expression, notamment lors des réunions professionnelles. Les discussions collectives sur l’organisation du travail et la marche de l’entreprise doivent permettre l’expression des potentialités de création de chacun.
- Reconnaître le rôle contributif des cadres : agir pour que le travail ne soit pas facteur de souffrance et d’aliénation, mais un moyen d’humaniser, une forme d’épanouissement des femmes et des hommes où chacun éprouve sa liberté par la création individuelle et collective.
- L’ouverture de négociations spécifiques sur l’égalité professionnelle femmes-hommes. Les négociations doivent s’appuyer sur le « rapport de situation comparée » annuel et obligatoire pour identifier les inégalités et définir les actions à mener pour aller vers l’égalité femmes-hommes en entreprise.
OBJECTIFS ET ÉVALUATION
De par leur situation intermédiaire entre les objectifs gestionnaires et le travail, les cadres doivent composer avec une organisation et des objectifs qui, d’une part, ne sont pas forcément les leurs, et, d’autre part, qu’ils doivent transmettre. Notre rôle dans l’entreprise, nos fonctions de concepteur, de gestionnaire ou d’animateur nous placent au cœur du télescopage entre nos aspirations novatrices et les conséquences des stratégies patronales.
Les collectifs de travail sont déstabilisés par les objectifs qu’assignent les directions qui, même s’ils correspondent parfois, au moins en apparence, à des buts légitimes, sont en contradiction avec les moyens qui sont alloués pour les satisfaire. De plus en plus de cadres sont responsables de projets sans pouvoir intervenir sur les moyens correspondants. Le patronat, les directions (d’entreprises et de services publics) transfèrent sur nous des risques et des responsabilités en matière de santé et sécurité que nous n’avons pas à assumer.
Poussée à son terme, cette logique conduit à remplacer le statut du salariat par celui de consultant et au retour du travail à la tâche. Pourtant, les cadres, comme tous les salariés, sont régis selon les règles générales de l’activité salariée et notamment, au lien de subordination envers l’employeur.
Il est urgent de mettre en place un véritable débat sur les objectifs et sur les organisations de travail. Ces questions doivent être discutées, et donc faire l’objet de propositions alternatives, d’interventions et de mobilisation des salariés.
Nous sommes dans une situation d’évaluation constante, soumis en permanence à des jugements. La doctrine de l’évaluation portant jusqu’à l’intériorité devient omniprésente dans le travail des cadres qui sont aussi encadrés. Cette obsession assujettit la liberté et la créativité de chacun, d’autant que le travail des cadres est souvent difficile à évaluer.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Elaborer collectivement les objectifs. Ils doivent s’accompagner d’une discussion sur les incidences prévisibles et sur les moyens nécessaires. Tout entretien d’évaluation doit être assorti de garanties (transparence, possibilité de recours) et prendre en compte la dimension collective du travail et son organisation (ou évolution d’organisation).
- Préparer l’entretien professionnel au sein du collectif de travail. Les moyens mis à disposition par l’employeur doivent être discutés. L’évaluation du travail ne doit pas se faire sans une base de critères objectifs et transparents.
- Tenir compte de la dimension collective du travail dans les évaluations et reconnaître l’apport individuel dans ce contexte.
- En cas de désaccord avec les objectifs fixés, le recours auprès d’une instance professionnelle, basés sur le collectif de travail, en présence des représentants du personnel.
DONNER DU SENS AU TRAVAIL
DONNER DU SENS
La finalité de l’entreprise n’est pas exclusivement économique et financière, mais d’abord humaine et sociale. Les choix de gestion doivent prendre en compte les conséquences humaines, sociales et environnementales.
En partant des ces principes, nous sommes favorables à la construction d’accords comme un moyen de faire avancer concrètement les choses, à condition de s’y impliquer. Des droits nouveaux, individuels et collectifs doivent être désormais attachés aux objectifs éthiques de l’entreprise, de la société, pour mieux les faire vivre en compatibilité avec la citoyenneté et les besoins sociaux.
L’UGICT prône un management alternatif ne se substituant pas au dialogue social collectif et visant à réorienter le rôle des managers vers :
- la restauration et l’animation du collectif de travail, lui-même tourné vers la résolution collective et le partage d’experience et de sens;
- le renforcement du soutien aux personnes, au collectif de travail (développement de la coopération transverse avec les autres équipes), l’innovation… ;
- l’accompagnement individuel et l’évaluation.
L’UGICT-CGT propose d’agir pour :
- Obtenir la participation des salariés avec voix délibérative dans les instances de direction et un droit suspensif sur les grandes questions concernant l’emploi dans l’entreprise.
- Développer la transparence des décisions en renforçant l’information et la consultation des salariés et de leurs représentants, y compris ceux des entreprises sous-traitantes.
- Favoriser le droit d’alerte, de propositions alternatives aux choix stratégiques, consolidant l’emploi, la reconnaissance des qualifications, la citoyenneté dans l’entreprise et l’exercice des libertés syndicales, y compris dans les entreprises sous-traitantes.
- Définir des plans d’actions sur les enjeux prioritaires de la Responsabilité Sociale d’Entreprise, avec suivi et indicateurs, sur la base d’accords négociés avec les organisations syndicales.
Voir aussi :
-
Retraite et protection sociale des cadres : prêts pour un tournant historique ?
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Salaires des cadres : c’est tendu
-
Cadres – En mouvements
-
Communiqué Ugict CGT sur la négo sur la notion d’encadrement
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