Voilà quelques jours la presse se faisait l’écho d’une embellie sur le front des salaires pour les cadres dont la rémunération médiane brute annuelle (la moitié gagne plus, l’autre moins) a augmenté de 2 % entre 2016 et 2017.
Ainsi annoncée, la bonne nouvelle masque en réalité un creusement des inégalités entre les différents niveaux hiérarchiques et entre les filières et les métiers en raison, notamment de la montée en puissance de l’individualisation des salaires « qui se traduit, de fait, par un tassement du niveau de salaire pour l’écrasante majorité des cadres », analyse la CGT des ingés, cadres, techs qui revendique « des mesures de rattrapage pour les cadres lésés ».
La bonne nouvelle largement claironnée dans la presse tendrait presque à faire oublier le bizutage salarial et social auquel sont soumis les jeunes diplômés lors de leur embauche. Le tassement des grilles de salaires, la non-reconnaissance des qualifications et responsabilités ont pris une telle ampleur que 20 % des cadres sont payés en dessous du montant du plafond de la Sécurité sociale c’est-à-dire moins de 3 311 € brut mensuel (39 732 € brut annuel).
Selon le baromètre de l’APEC, le début de la carrière se caractérise par des niveaux de salaire de 28 000 € brut annuel pour un niveau de formation BAC+3 et 30 000 € brut annuel pour un niveau BAC+5. Il ne faudrait surtout pas imaginer à la lecture de ces annonces d’embellie que les cadres bénéficieraient d’une sorte de retour à bonne fortune et encore moins qu’ils seraient redevenus les enfants choyés du patronat. Le patronat n’a pas renoncé au motif d’une prétendue sortie de la crise à sous payer le travail qualifié, à individualiser les rémunérations, à faire baisser le « coût du travail » en exigeant du gouvernement des exonérations de cotisations sociales.
Ces annonces ne peuvent non plus masquer la tension qui règne sur les salaires parmi les cadres. Cette tension, on la mesure avec le baromètre cadres 2018 Ugict-CGT / SECAFI, réalisé par Viavoice publié le 13 septembre. Il révèle que 59 % des cadres considèrent que leur rémunération est en décalage avec leur temps de travail et 53 % avec leur implication. Et là encore, il s’agit de moyenne car les femmes cadres affichent une insatisfaction plus importante, « ce qui confirme leur lucidité sur les inégalités salariales », analyse l’Ugict-CGT. La CGT des ingés, cadres, techs revendique notamment pour en finir avec cette insupportable inégalité la mise en place de sanctions financières pour les entreprises qui ne respectent pas la loi sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Augmenter les salaires, reconnaître les qualifications et les responsabilités, c’est bon pour l’économie afin de soutenir la croissance par la consommation et financer les besoins de protection sociale. Notre pays en a besoin et c’est à sa portée : 47 milliards de dividendes ont été versés aux actionnaires rien que pour le premier semestre de l’année. La France a même atteint le niveau record de 2008 année de déclenchement de la crise financière mondiale. Ces trente dernières années, la masse salariale des entreprises non financières a été multipliée par 3,6 alors que les dividendes versés aux actionnaires l’ont été par 20 en trente ans.
Alors il est temps que cette tension que l’on ressent sur les salaires se transforme en mobilisation sociale. Le 9 octobre, c’est un de ces moments que les salariés qualifiés et en responsabilité peuvent saisir pour agir et revendiquer.
Source : Le blog de l’Ugict-CGT