« L’appropriation capitaliste des outils, des finalités et des résultats du travail opère une séparation entre les travailleurs et les conditions d’effectuation de leur activité. Cette non-maîtrise du travail vaut dans les deux dimensions de ce dernier : le travail concret, la valeur d’usage qu’il produit, les conditions de son exercice ; et le travail abstrait, la production de valeur économique et donc le choix des investissements, des lieux de production, des fournisseurs et des clients, les créations et suppressions d’emploi, les salaires.
Les humains se trouvent ainsi dépossédés de tout pouvoir sur ce qui constitue la vie même : la construction de notre monde, en négociation avec la nature et tous les autres vivants, par le travail dans sa double dimension abstraite et concrète. Pire, cette dépossession est doublée d’une menace structurelle. Car la rentabilité du capital reposant sur une productivité fondée sur l’élimination relative du travail vivant, les travailleurs sont toujours de trop, soumis à la menace permanente d’une sanction par suppression de l’emploi, licenciement ou, pour les indépendants, échec sur le marché des biens et services. » Extrait du livre « Le travail, enjeu des retraites » Bernard Friot, éditions La Dispute.