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Lettre ouverte à Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances.


Suite à l’intervention de la secrétaire d’État, Agnès Pannier-Runacher dans le cadre du 2ème projet de loi de finances rectificatives.


Au lendemain de la seconde guerre mondiale lorsque tout était à reconstruire, le rôle des pouvoirs publics était d’empêcher que des groupements d’intérêts particuliers puissent contrarier l’intérêt général.

Lors de l’examen du 2ème projet de loi de finances rectificatives, à la question des besoins en bouteilles d’oxygène et de leur caractère soit disant « non-vital », argumentant ainsi le refus de nationaliser l’usine Luxfer de Gerzat, votre secrétaire d’État a de nouveau fait la démonstration que les priorités du gouvernement au service du libéralisme, s’inscrivent plus que jamais dans la continuité et ce, malgré un contexte de crise violente pour la population.

Preuve s’il en fallait, votre secrétaire d’État déclarait le 8 mars :

 « C’est le moment de faire des bonnes affaires en bourse»

#LaMatinalepic.twitter.com/TUD9FPL3Hz

— CNEWS (@CNEWS) March 10, 2020

Malgré les alertes des syndicats CGT et des députés de l’opposition, force est de constater que l’urgence est de répondre aux piailleries du capitalisme et de la finance plutôt qu’à travailler à la reconstruction urgente, nécessaire et vertueuse du maillage industriel de la France.

Affirmer que l’oxygène « arrive directement dans les chambres » des hôpitaux laisse à supposer que tous les hôpitaux seraient équipés de générateurs d’oxygène médical : C’EST FAUX !!!

Cela relève d’un manque de connaissance des réalités, de l’incompétence et du mensonge dont chacun pourra se faire sa propre opinion. Au-delà des prescriptions médicales inhérentes à l’oxygène médical, les utilisateurs de bouteilles aluminium sont bien plus innombrables encore :

  • Médical : Oxygénothérapie fixe et mobile, Ephad, Secouristes, SAMU, Pompiers, vétérinaires…
  • Autres secteurs d’activité : Marine nationale, plongeurs professionnels, analyse de l’air et environnement, laboratoires CNRS, CEA, CNRS, Laboratoire national d’essai, universités, constructeurs automobile, industries chimiques, …

La chaine de production d’oxygène médical n’est pas moins stratégique que celle du médicament ! D’une part parce qu’il n’aura échappé à personne que l’oxygène médical est un principe actif, d’autre part parce qu’en dehors de certains hôpitaux équipés de générateurs d’oxygène médical, ce sont ces mêmes bouteilles qui sont systématiquement et largement utilisées, tant par les intervenants médicaux que par tous les secteurs industriels.

Les bouteilles en aluminium sont tout autant stratégiques ! Car en dehors des contraintes qualité liée au médical, tous les secteurs d’activité concernés par l’approvisionnement en gaz optent pour l’aluminium pour ses caractéristiques particulières et spécifiques, critères d’autant plus déterminants pour le marché international s’agissant de la technologie innovante mise au point par les salariés de LUXFER Gerzat, qui a un coût carbone par unité produite inférieur à la concurrence. 

Pour toutes ces raisons, la relocalisation de la production des bouteilles aluminium est hautement stratégique pour la simple et bonne raison que si le site industriel de LUXFER Gerzat répond déjà aux contraintes qu’à l’État d’assurer la pérennité de l’approvisionnement de l’oxygène médical sur tout le territoire dans l’intérêt de la population, le site de Gerzat est également un atout industriel immédiatement disponible répondant à une problématique bien plus large pour l’ensemble de l’économie française, en particulier dans un contexte où tout devra être repensé, reconstruit, consolidé et pérennisé.

Ce point a semble-t-il échappé au ministère de l’économie et des finances, de l’Industrie et de la Santé.

Sur le plan stratégique, le gouvernement n’est pas sans ignorer que LUXFER Holdings a racheté le site historique français de Gerzat pour finalement se débarrasser du seul concurrent Européen établi sur le sol français. Cela est condamnable et relève de pratiques anticoncurrentiel, d’un abus de position dominante, le tout sous contrôle de l’État.

Qu’ont fait l’État français et l’Union Européenne pour éviter ce désastre industriel ? Pourquoi le droit n’a-t-il pas été appliqué ?

S’agissant de la chaine de production et d’approvisionnement en oxygène médical, la secrétaire d’État a annoncé que 200 000 bouteilles circulent en France en 2020 alors qu’il y en avait 450 000 en circulation en 2008 (Source : Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé).

Pourquoi y a-t-il deux fois moins de bouteilles en circulation aujourd’hui ? 

Si 20 000 bouteilles supplémentaires ont été mises en circulation dans le cadre de l’épidémie du COVID-19, n’est-ce déjà pas le signe d’un approvisionnement insuffisant, au même titre que les masques de protection individuels ou les tests diagnostiques Covid-19 ?

Concernant la sécurité et la santé, le gouvernement a-t-il connaissance que le contrôle réglementaire décennal de résistance à  la pression des bouteilles les rendent impropres à l’utilisation médical ? Cela oblige à compenser pour maintenir la capacité d’approvisionnement.

De plus, faute de bouteilles neuves, les travailleurs de l’industrie des gaz médicaux n’ont d’autre choix que d’approvisionner en urgence l’ensemble du corps médical avec des bouteilles issus du stock tournant (ré-éprouvé) et ce, en flux tendu. Le plus grave étant les dérogations aux contrôles périodiques, accordées à la demande de L’AFGC et de L’EIGA en date du 19 mars 2020 par le ministère de la Transition écologique et solidaire en vue de « maximiser la quantité ». De fait, cela présente des risques d’explosion des bouteilles ainsi que des impacts sur la sécurité des personnels de conditionnement et des utilisateurs (soignants, malades,…).

Une telle politique dérogatoire sur un principe actif médical entraine de plus nécessairement des conséquences sur le processus qualité du médicament Oxygène médical. La qualité étant altérée, l’oxygène pollué impacte directement les malades.

Poursuivant dans l’ignorance, la secrétaire d’État a affirmé que l’on pouvait remplacer les bouteilles aluminium par des bouteilles aciers en évoquant des temps difficiles !!! 

Une telle préconisation est un véritable aveu et une preuve supplémentaire de méconnaissance des réalités industrielles par les fonctionnaires d’État en plus qu’elle annonce un risque de pénurie des bouteilles !

L’acier étant constitué de fer, il s’oxyde sous l’action de l’oxygène. L’oxygène médical étant un médicament, cela rend l’acier incompatible avec ce principe actif !

Sauver LUXFER pour l’intérêt général !

Proclamer que Luxfer Gerzat n’est pas sur la liste des entreprises à sauver relève du choix dogmatique du gouvernement et engage sa pleine responsabilité.

Considérant que le gouvernement a maintenant connaissance des éléments permettant de comprendre pourquoi les bouteilles contenant l’oxygène médical ne peuvent être qu’en aluminium, que les ruptures capacitaires sont inenvisageables tant pour le médical que pour l’industrie, nous réaffirmons l’urgence de redémarrer l’activité LUXFER Gerzat, indispensable à l’ensemble de notre industrie et pour notre santé.

Le choix final incombe maintenant au gouvernement, qui engage par conséquent une fois de plus sa responsabilité et sa capacité déjà  bien écornée à se préoccuper de la population. 

Le gouvernement serait bien éclairé de faire de l’intérêt général sa priorité.

…L’histoire ne s’écrit jamais du côté des perdants ! 

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